La discrimination positive, cache-misère de l’inégalité scolaire.
L’éducation prioritaire reste la vitrine médiatique de la « discrimination positive » chère à nos zélites. Une prime pour les enseignant-e-s, la maternelle dès deux ans, et des classes moins surchargées, ce sont les trois mesures phares des ZEP, pour mieux cacher le fait que l’école renforce de plus en plus les inégalités qu’elle est censée combattre.
L’Etat fait des économies sur les REP : les 150 000 enseignant-e-s des REP touchent une indemnité de 1 100 euros annuels, destinée à leur faire fermer leur gueule. Mais ces collègues sont, en majorité, des débutant-e-s, (aujourd’hui, dans les ZEP, 25 % des enseignant-e-s ont moins de 30 ans, contre 15 % ailleurs). Donc leurs paies, même avec cette indemnité, sont globalement inférieures à celle d’un collègue « hors classe » dans un lycée tranquille. Donc les REP coûtent peu à l’Etat employeur. Preuve que cette indemnité est absolument inadaptée : les équipes enseignantes ne sont pas stables dans les REP. Les collègues font deux ou trois ans puis craquent, ce qui porte un préjudice très fort aux élèves. SUD revendique la baisse du nombre d’heures devant élèves pour les collègues concerné-e-s, avec concertation et formation spécifique sur le temps de travail.
Scolarité raccourcie... Avec la disparition progressive de la maternelle, mesure d’économie budgétaire renforcée par la loi Fillon, la scolarisation des élèves de 2 ans passe à la trappe, alors qu’elle profite davantage aux enfants des familles populaires. La disparition de la maternelle a pour effet de maintenir au foyer de nombreuses mères : il s’agit d’une mesure sexiste. A l’autre bout de la chaîne, l’apprentissage dès 14 ans vire précocement du système scolaire celles et ceux qui auraient le plus besoin d’école. SUD revendique une vraie scolarité obligatoire, de 2 à 18 ans.
Des classes encore trop chargées : dans les ZEP, on compte en moyenne deux élèves de moins par classe à l’école primaire et au collège. Ce chiffre brut masque l’insuffisance de cette réduction d’effectif (voir l’article présentant les théories de Thomas Piketty dans Le Monde du 6 septembre 2004). Selon l’Insee, les ZEP n’ont eu aucun impact sur la réussite des élèves, en raison de la faiblesse des moyens déployés. L’Etat donne juste assez pour que ça n’explose pas, mais pas assez pour que les élèves réussissent. Le seul objectif des ministres (PS, UMP, UDF...), c’est la paix sociale. SUD revendique la stricte limitation à 20 élèves par classe, avec deux enseignant-e-s titulaires en permanence pour chaque classe.
L’Etat investit chaque année environ 600 millions d’euros dans les ZEP, pour 1,7 million d’élèves. 600 millions d’euros, c’est seulement 1 % du budget du ministère de l’éducation nationale. Et ça représente 235 euros supplémentaires par élève et par an. Un collégien de ZEP coûte ainsi, pour l’Etat, nettement moins cher qu’un lycéen et près de deux fois moins qu’un élève de classe préparatoire aux grandes écoles. Etant entendu que pour l’essentiel, les élèves des classes préparatoires ont des parents qui ont fait, eux-mêmes, des études supérieures. Donc la « discrimination positive » dans l’éducation nationale joue beaucoup plus en faveur des enfants d’ingénieurs ou d’enseignant-e-s que des enfants d’ouvrier-e-s. En terme d’effort budgétaire, ce sont les zones rurales qui raflent la mise : les académies les mieux financées en métropole sont la Corse (4 960 euros par élève en moyenne) et le Limousin (4 740 euros). A titre de comparaison, la moyenne en Rhône-Alpes est de 3 640 euros par élève. Notre système favorise d’abord les riches, puis les zones rurales... Quant aux enfants des banlieues populaires... Il faut qu’ils crament des bagnoles pour exister publiquement.
(données chiffrées : article de Luc Bronner paru dans Le Monde du 22.11.05)