Contribution SUD Éducation Haute-Normandie

jeudi 28 octobre 2004

Voici une première réaction d’un copain de Sud éduc Haute Normandie sur les grands axes du rapport Thélot. C’est brut de décoffrage.
On va essayer d’approfondir ("on", c’est notamment la Comm Ecole et Mondialisation cap)

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Le rapport Thélot vu par 7627

Le Rapport Thélot

Issu des discussions menées lors du grand débat sur l’école, le rapport Thélot devait refléter par des propositions ce que pensent les français de leur école. Dans sa version définitive, rendue le octobre 2004, il est censé être la muse du ministre de l’éducation nationale pour rédiger sa future loi d’orientation (applicable en 2006-2007). C’est un travail qui, bien que ses auteurs s’en défendent, est le canevas de la future loi d’orientation (voir les encadrés qui illustrent le propos du rapport).

Derrière un ensemble de propositions qui font accord, de constats tirés par tous depuis longtemps et de généralités plus ou moins réactionnaires se dissimule un vrai texte idéologique (dont il ne fait aucun doute qu’il était préparé avant le grand débat). Il reprend les idées qui sont en vogue dans le monde néolibéral. L’inscription de ce rapport dans le cadre des politiques éducatives déterminées au sommet européen de Lisbonne en mars 2000 n’est donc pas une surprise. Il reprend les grandes lignes de « l’e-learning », du « memorandum sur l’éducation et la formation tout au long de la vie » et le « rapport sur les objectifs concrets futurs des systèmes de formation » (textes par ailleurs analysés dans l’excellente brochure de la Commission école et mondialisation capitaliste, L’école face à la mondialisation capitaliste). Bref, tout ce que Sud Educ dénonce depuis au moins Allègre se trouve dans ce rapport, quand frappe le syndrome de Cassandre... Il s’agit bien d’une offensive générale néolibérale sur le système éducatif français :
- la marchandisation de l’école est prégnante dans tout le texte, qui parle des élèves et des parents comme d’agents économiques rationnels aptes à faire des choix (d’ailleurs, « l’éducation aux choix » est une partie importante de ce qui est proposé, oh pas l’éducation aux choix de société ni aux choix politiques !! il ne faut pas pousser ...) en fonction d’un ratio coût/efficacité même si ce n’est pas dit comme cela !
- la privatisation des services publics est en filigrane dans le texte, remise en cause des statuts, du caractère national de l’éducation, de la valeur nationale des diplômes, contractualisation des établissements, partenariats avec des « organisations de la société civile » (comprenez des entreprises) , diminution du nombre de fonctionnaires.
- La précarité est au cœur de la vision de la société véhiculée par le rapport puisqu’on nous demande de préparer les élèves à l’adaptabilité, à l’employabilité, à la flexibilité, à la mobilité.
- La dégradation des conditions de travail des enseignants est très clairement envisagée. Augmentation du temps de présence des enseignants dans les établissements, bivalence voire polyvalence pour les professeurs du second degré et a contrario une spécialisation plus poussée des enseignants du premier degré, affectation sur des réseaux d’établissements, hiérarchisation accentuée dans les équipes pédagogiques (diviser pour mieux régner), sanctions, évaluation, recrutements et promotion des enseignants par les chefs d’établissement et les IPR suite à des entretiens individuels, multiplication des tâches administratives (dont la vie scolaire) pour les enseignants ou comment se débarrasser des derniers MI-SE et des nouveaux assistants d’éducation... Bref on veut appliquer à l’éducation nationale des techniques de management des ressources humaines qui ont fait leurs preuves ailleurs, en particulier dans les pays anglo-saxons.
- Le contenu de ce que le rapport nomme « le socle commun » se résume à lire, écrire, compter, s’exprimer, cliquer (sic), maîtriser l’anglais de communication internationale et vivre en société. En gros, pour fournir une main d’œuvre servile au patronat, il ne faut surtout pas trop lui en apprendre (ex : une trop grande connaissance de l’histoire permettrait de comprendre qu’en novlangue néolibérale, modernisation signifie retour au XIX° siècle). Si en plus les élèves sont formés à vivre en société, c’est-à-dire à obéir, c’est encore mieux.
- Les enseignements des matières qu’on peut qualifier aujourd’hui de culturelles sont totalement inexistants : plus d’histoire-géographie, peu de philosophie, d’économie, de langue vivante hors « anglais de communication internationale » (finies la littérature et la civilisation ...) Les arts deviennent optionnels. Il faut bien reconnaître que ces matières contribuent à développer l’esprit critique des enfants, pas bon ça ...
- L’organisation en cycles prévue par le rapport (apprentissage, approfondissement et diversification) entérine de fait, bien que le ministre le nie, la disparition des écoles maternelles, hors grandes sections intégrées au premier cycle. De plus, la diversification dès la 5° réintroduit une filiarisation précoce au nom du droit de chaque élève à trouver son domaine d’excellence.
- Le fantasme du retour à l’autorité n’est plus l’apanage de M6 et du « pensionnat de Chavagnes ». Les partenariats avec la justice et la police sont encouragés pour signaler le plus tôt possible les élèves à problèmes. Quand le rapport Thélot, les lois Sarkozy et Perben se croisent, on doit craindre la mise en place d’un maillage de la délation.

Je pense ne pas avoir été exhaustif tant le rapport est dense. Cependant on y retrouve ce qui est écrit dans d’autres publications dont l’orientation politique ne fait aucun doute : textes du MEDEF, de l’OCDE, de l’OMC (AGCS), de l’ERT (le Medef européen) de la banque mondiale ... rien que des philanthropes dont la seule obsession est privatiser tout ce qui est, tout offrir au sacro-saint marché bien plus efficace que l’Etat. De plus le récent rapport Camdessus (l’ancien patron du FMI, celui qui a ruiné l’Afrique avec ses plans d’Ajustement structurels) intitulé Le sursaut, vers une nouvelle croissance pour la France, dans son chapitre IV, « Vers une économie de la connaissance », propose des solutions pour l’enseignement qui sont déjà contenues dans le rapport Thélot. Notre ministre des finances, le petit Nicolas a jugé ce travail « remarquable » et en a fait son livre de chevet !
Même si une partie de ce qui est dans le rapport est destinée à être enlevée pour que les syndicats puissent crier victoire... méfiance.

Nota Bene : le Projet académique de Rouen pour la période 2004-2007 est paru au moins de juin 2004, c’est-à-dire trois mois avant la publication du rapport Thélot. Avec une prodigieuse intuition voire prescience, il reprend les mêmes thématiques, préconise les mêmes solutions ... Il est plus que probable que certaines académies aient été officieusement désignées pour expérimenter les dispositions qui sont contenues dans le rapport. Gloire à notre rectrice zélée


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